Le « voyage participatif » en Inde : « vivre et partager le quotidien de la population locale »

L’Inde reste la destination phare de Human Trip depuis sa création en 2007. C’est naturellement que, 3 ans plus tard, est né Human Trip India. Philippe Malet, président de l’ONG Speed Trust, a accepté de chapeauter la petite structure depuis là-bas (Madras, Inde) et de développer les projets de tourisme solidaire, quand son agenda le lui permet, entre mille occupations. Puis l’idée du voyage participatif a fait son chemin et aujourd’hui, Philip accueille et occupe les volontaires que lui envoie Human Trip. Il a accepté de répondre à quelques questions pour Human Trip.

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Philippe, tu es engagé dans des ONG en Inde depuis longtemps… D’où te vient l’idée du voyage participatif que tu proposes ? Et comment le définirais-tu ?

L’idée, c’est Jean-Marc Ragone (directeur de Human Trip) qui me l’a inspirée en 2009, alors que j’organisais déjà des circuits de visite axés sur les producteurs d’artisanat équitable. Depuis la création de SPEED Trust (officiellement en 2003, mais nos activités avaient commencé en 1999), notre philosophie est d’aider les gens à s’aider eux-mêmes, c’est-à-dire en développant des activités rémunératrices, en suivant des formations, en bénéficiant de microcrédits, voire de macro-crédits (auto rickshaws, études supérieures…). De fait, cette philosophie devait s’appliquer à notre propre organisation : devions-nous dépendre de la charité ou promouvoir des actions nous permettant à la fois d’acquérir des techniques et un savoir-faire, de nous approprier des idées mais aussi de générer des revenus pour financer les projets de l’association ? Naturellement, un programme de tourisme solidaire s’inscrivait dans ce sens.

Après avoir formé plusieurs femmes veuves ou abandonnées du bidonville de Gandhi Nagar (Madras), il nous incombait de développer leur activité en proposant des circuits de visite de Chennai, guidés fièrement par ces femmes. De même, accueillir des volontaires nous permettait à la fois d’engranger de nouvelles idées et de les appliquer tout en collectant un financement indispensable à la réalisation de ces activités. Ainsi, à SPEED Trust, chaque volontaire partage ses idées et sa contribution permet par exemple d’organiser une sortie éducative pour les enfants de la crèche, d’acheter du matériel pédagogique.

Partant de ce principe et sachant que SPEED ne pouvait accueillir tous les volontaires qui en faisaient la demande, nous avons fait le choix d’élargir ce programme à d’autres organisations (sérieuses !) dans le cadre des activités de Human Trip India, l’organisation de tourisme solidaire intimement liée à SPEED Trust: on travaille aujourd’hui avec le GRRC, SUYAM, Crocodile Bank, ITWWS, RIDE. Ainsi, des volontaires peuvent être maintenant accueillis au GRRC, une ONG partenaire qui chaque année pendant le mois de mai accueille plus de 200 enfants des bidonvilles de Chennai (Madras) dans le cadre de « colonies de vacances » de SPEED Trust. La restauration, le développement et l’aménagement de nouveaux locaux ont pu se faire grâce aux séjours de groupes d’étudiants français accueillis par Human Trip India.

Parallèlement, Human Trip, en France, grâce à sa participation, parraine et soutient la scolarité en école de langue anglaise de trois enfants du bidonville de Gandhi Nagar, à hauteur de 800€ par an. De même, hors du cadre du programme de volontariat, Human Trip India propose maintenant des activités tournées vers le développement communautaire. Ainsi la journée à Mahabalipuram, depuis Chennai, permet de soutenir une communauté de pêcheurs, de développer un projet de chambres d’hôte chez l’habitant, chose encore très rare en Inde, où le tourisme équitable et solidaire n’en est qu’à son balbutiement. Comme je le soulignais encore cette semaine auprès d’une communauté de pêcheurs, il n’y aura plus de tsunami, et s’il y en a un, il n’y aura plus cette masse de fonds mal utilisés ou détournés alors qu’ils étaient destinés à vous aider. Donc comptez sur vous-même pour trouver des financements sains et durables, comme une forme de tourisme saine et durable.

Qui sont les personnes qui viennent chez toi et que cherchent-elles vraiment, selon toi ? A ton avis encore, le trouvent-elles ?

Les volontaires que nous accueillons sont des personnes d’abord en quête d’authenticité, des personnes qui souhaitent vivre et partager dans une certaine limite du possible, le quotidien de la population locale loin du surfait des villages vacances, des hôtels cinq étoiles, des « beach resorts » (complexes touristiques balnéaires, NDLR). Pourquoi venir en Inde chercher ce que l’on trouverait sur la Costa Brava ? Ceux qui viennent cherchent plutôt une expérience humaine inoubliable et vraie. Ce sont ensuite des personnes qui n’ont pas forcément ni les diplômes ni l’expérience ni le temps ni le goût pour consacrer leur vie à l’humanitaire, mais qui trouvent à travers les séjours que nous organisons une opportunité de se livrer, de couper avec leur quotidien, de s’exprimer, même de la façon la plus farfelue, exubérante, innocente.

C’est le cas, par exemple, avec les enfants handicapés psychomoteurs d’Anjali, un magnifique projet du GRRC soutenu par Human Trip India. Ces enfants permettent aussi aux volontaires d’aller au bout d’eux-mêmes, d’être vrais, de ne pas tricher, de se connaître au fond de soi. C’est le meilleur exemple, la meilleure affirmation de l’échange et du partage, dans l’amour et le respect réciproque.

Y a-t-il des fois où ça n’a pas collé ? As-tu des anecdotes amusantes à nous raconter ?

Il est évident que ce type de voyage d’abord (la police des frontières indienne est déjà une épreuve en soi), et de séjour ensuite, demande un minimum de préparation et surtout d’équilibre psychologique. On ne vient pas en Inde régler ses problèmes personnels : on les emporte avec soi et ils vous explosent ensuite à la figure. D’où la nécessité en amont de « filtrer » les demandes pour ne pas avoir sur place, comme c’est déjà arrivé, a reconduire trois jours après son arrivée, un(e) volontaire, en larmes et sous tranquillisants à l’aéroport.


Note 
: Si vous voulez partir en voyage participatif ou en circuit tourisme équitable organisé avec Human Trip dans le Tamil Nadu, vous seront aussi proposées des activités solidaires à la journée avec Human Trip India. Si vous allez en Inde façon routard, vous pouvez également faire une bonne action en rejoignant un programme solidaire pour une journée.

Vous en voulez encore ?

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Il y a 2 commentaires

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  1. morgane@villa vacances bord de mer

    c’est le genre de voyage qui en plus d’aider les autres te fait remonter ton estime de soi et des autres. Je pense qu’il faut le faire au moins une fois dans sa vie

  2. Rina114

    Si l’on recherche une nouvelle expérience, et qu’on a le temps pour cela, le voyage participatif est vraiment une bonne idée. Il se développe peu à peu, mais c’est encore insuffisant selon moi.


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