Des bus rutilants
Un aspect frappant et enchanteur du Guatémala, ce sont ses innombrables bus scolaires nord-américains, repeints en couleurs. Certains sont de toute beauté et j’ai d’ailleurs débuté une collection de photos. Ils sont un élément si quotidien qu’il s’en vend même en jouets (en bois sculpté ou en fer). En raison de l’analphabétisme et de l’illettrisme qui affectent encore une partie de la population (les chiffres sont les plus élevés chez certaines populations paysannes indigènes, surtout chez les femmes), les bus ont une certaine couleur, qui indique un certain itinéraire. De l’extérieur, on les voit plastronnant de letreros (écriteaux autocollants) religieux, d’autocollants de football (Madrid ou Barcelone est presque une question politique ici !) ou de cartoons (notamment Sam le Pirate, fréquemment présent à l’arrière des véhicules et sur les garde-boue).
L’aspect moins enchanteur, c’est quand on est dedans. OK, y’a quand même un côté marrant : des autocollants de pin-up voisinant avec des autocollants religieux, parfois une peluche décatie suspendue à une ficelle… Pour le côté moins marrant : un chauffeur tête-brûlée roulant à tombeaux ouvert (parfois même soûl) sur des routes peu sûres, vous avec vos grandes pattes d’occidental coincé sur un siège prévu pour des enfants américains de 8-10 ans (vous vous souvenez des bus jaunes des Simpsons ou de South Park ?), des banquettes pour deux enfants surchargées de trois personnes (dont de sacrés gras du bide) pour un total de 7 personnes par rangée (deux banquettes + l’étroit passage au milieu occupé par qui peut y asseoir une demi-fesse)… Le tout sur fond d’une stéréo criarde crachant du reggaeton ou des chansons mélo beaufissimes (imaginez du Booba ou du Pascal Obispo à fond les ballons pour équivalence), quand ce ne sont pas des chansons évangéliques indigentes. Sans même parler des continus hululements des assistants qui, à l’entrée du bus, apostrophent les passants pour y entrer en gueulant la destination.
C’est marrant quand on est touriste et ça fait partie de l’attraction. A la longue, quand on réside sur place, on préfère se dispenser de ce mode de transport autant que faire se peut, surtout lorsqu’on sait la fréquence des accidents.
Jesucristo Superstar : bondieuseries à gogo !
Héritage colonial, l’Amérique latine est un continent en écrasante majorité chrétien : les catholiques, par l’ancienneté de leur enracinement, demeurent majoritaires, mais divers courants évangéliques (pentecôtistes, témoins de Jéhovah, mormons, etc.) connaissent une progression colossale, qui préoccupe l’Eglise catholique. Ce n’est, du reste, sans doute pas un hasard si les JMJ 2013 ont été organisées au Brésil, pays le plus « affecté » du continent. Le second de toute l’Amérique centrale où la progression est la plus forte est le Guatémala où, à la capitale, existent même deux églises que je qualifie volontiers de « stades de la foi » (Mega Frater, capacité de 12 200 personnes et 2500 places de parking, et l’église Ciudad de Dios, 11 000 personnes et 3300 places de parking).
La religion est partout : depuis les noms – catholiques – des villes et villages (San Marcos, San Pedro, San Miguel…) jusqu’aux vitres des véhicules en écriteaux autocollants, à la télévision en la personne de prédicateurs-showmen charismatiques aussi bien que dans la rue, sur le marché, avec des prédicateurs ânonnant leur savoir biblique…
La question est complexe. Elle m’est d’abord apparue de façon simpliste, comme une métaphore. J’estimais — et le pense encore — que l’Amérique latine était historiquement mariée de force aux Etats-Unis, mari violent qui tour à tour frappe (domination économique et militaire, nombreux coups d’Etat et appui aux dictatures) et caresse (ONG, missions évangéliques financées par des sectes nord-américaines) mais ne souhaite pas la liberté qu’il proclame à hue et à dia. C’est peut-être un angle interprétatif commode, mais il est insuffisant. Il n’en reste pas moins que la pénétration des églises évangéliques, si elle apporte certains bienfaits individuels, voire collectifs (la lutte contre l’alcoolisme et la violence dans les villages de campagne, notamment), est aussi un important facteur de division et de fractionnement d’une population déjà très divisée. A mesure qu’avanceront les mouvements évangéliques et tant que se maintiendra le conservatisme de l’Eglise catholique, l’unité sur des bases idéologiques de mouvements politiques proposant un changement ici-bas paraîtra lointaine (lire à ce sujet l’article du Monde Diplomatique sur la gauche nicaraguayenne au pouvoir).
La violence, un phénomène social d’envergure
Au Mexique et en Amérique centrale, dans certaines zones plus précisément, la barbarie (viols sur mineurs, trafic d’enfants, personnes enlevées et retrouvées démembrées…) est devenue une partie du quotidien. L’extrême misère, le narcotrafic, un passif et une mémoire de décennies de guerres civiles sales, les criantes inégalités de richesses, les mafias et les gangs salvadoriens (pandillas) renvoyés depuis les Etats-Unis au moment de la signature de la paix au Salvador en 1992 et qui ont colonisé les capitales du Honduras et du Guatémala, tout cela a fait de la violence un fléau « ordinaire » par sa quotidienneté qui va de la petite délinquance jusqu’aux attaques contre les fonctionnaires de l’Etat, en passant par toutes sortes d’attaques à main armée et rackets. Au Guatémala, les gangs et narcotrafiquants seraient plus armés que la force militaire nationale. A titre indicatif, et même si cet événement est exceptionnel, le 13 juin 2013, huit policiers furent assassinés dans la petite ville de Salcajá, lors d’une attaque d’un commando armé.
Le quotidien national le plus connu est Nuestro Diario, surnommé Muerto Diario (« Notre journal », devient « Mort journal »), qui rend compte à longueur de pages de morts parfois d’une barbarie inouïe dont une seule suffirait à faire la une des JT français.
Mais c’est contre les cas de violence plus ordinaire, plus « petite » qu’une vigilance des voisins est encouragée. Le pochoir publié ci-dessus a été photographié à San Andres Xecul, petit village des environs de Xela, mais je l’ai vu en divers endroits du pays. L’indolence de policiers médiocres et souvent corruptibles est largement responsable de ce que dans divers endroits, ont lieu des cas de justice expéditive et de lynchages, la population se chargeant pour le meilleur et pour le pire de sanctionner les voleurs et les petits bandits. Il y a quelques jours, on me parlait de la « justice maya » : après un vol ou un acte de violence, celui qui est attrapé reçoit une punition. Quelqu’un est désigné par le doyen de la communauté pour fouetter le délinquant, qui doit ensuite se racheter en faisant un service pour la communauté.
La singulière manie des serviettes de papier
Plus comique est la manie des serviettes. Elle m’a d’abord étonné, puis j’y suis habitué. Au Mexique un peu, mais surtout au Guatémala, il est fréquent de servir un verre ou une bouteille de bière avec une serviette de papier enroulée de façon plus ou moins coquette autour. Certains poussent le zèle jusqu’à l’absurde : je me souviens d’un bock de bière qui, venant avec la bouteille d’autre part, avait à son fond, élégamment posée, une serviette de papier. Quand je reviens par ici, c’est un de ces tout petits détails qui me fait dire : « Pas de doute possible, je suis au Guatémala ».
Publicité partout, justice nulle part
Il semble que n’existe aucune limitation légale relativement au format des panneaux publicitaires à la capitale du Guatémala – ou alors, si elle existe, elle n’est pas appliquée, le légalisme paraissant ici rare comme le radium. La ville, déjà plutôt hideuse (imaginez un mélange de bidonville et de zone commerciale européenne dans une version délabrée, ajoutez-y de hauts murs coiffés de barbelés ou de tessons de verre, des vitres teintées, de vieux bus scolaires nord-américains usés et crachant des nuages de fumée noire, un urbanisme de la peur ponctué de rares zones moins hideuses, des centres commerciaux comme principaux lieux de tranquillité, et vous aurez une idée approximative de cette capitale), d’ailleurs élue en 2008 la plus laide du monde selon le site U City Guides, est par surcroît affectée d’une pollution publicitaire qui ferait passer celle de France pour dérisoire.
Les femmes décoratives et le machisme
Le féminicide (ou femicidio, en espagnol) est un phénomène si grave en Amérique latine, et particulièrement au Mexique et en Amérique centrale, que l’ONU Femmes a poussé divers gouvernements du continent à adopter des lois pour la défense des femmes. On ne pourrait qu’à peine envisager quelque chose d’approchant en jetant un œil au cas italien (voir à ce sujet le docu Il corpo delle donne). Le machisme, et les féministes le savent bien, est un environnement, un monde de représentations, une masculinisation de l’espace. La publicité érotise le corps des femmes pour un oui, pour un non ; le corps des femmes est valorisé plus que leur capacité créative ou leur intelligence.
De cet imaginaire viriliste dominant, procède le fait que la double journée des femmes est ici l’ordinaire (lors même que les deux époux travaillent, madame fait la popote après le boulot quand monsieur, les pieds sous la table, se relaxe), les violences conjugales atteignent des taux records ici (le Salvador est le premier pays au monde) et, cela va de pair, les femmes intériorisent ce statut inférieur et sur-sexualisé vestimentairement (il faut voir le tragicomique défilé de femmes sur pilotis de 10-12 cm allant en boîte ou rentrant à la maison avec une démarche de canards au cœur de la nuit), médiatiquement (pin-ups de Nuestro Diario) ou encore par ce que je nomme les « concours de femmes décoratives », c’est-à-dire les concours de Miss, tout étant prétexte à une élection de miss (j’ai même souvenir d’une Miss du centre commercial La Pradera à Xela). Et j’allais oublier les femmes décoratives venant vanter la bière « nationale » (c’est-à-dire la pisse de chat que vend l’oligarque sous argument patriotique) ou telle marque de rhum.
Pour avoir parlé à des femmes engagées dans l’éducation sexuelle ou des amies féministes, le chemin est encore très long, d’autant que les femmes elles-mêmes, comme souvent, intériorisent et adhèrent à ces structures de domination sexiste. Le machisme et a fortiori le phénomène du féminicide est à rattacher à des dynamiques encore plus larges, comme l’estime l’universitaire mexicaine Marcela Lagarde (Université nationale autonome du Mexique) : « (…) plus il y a de démocratie, plus il y a de développement et moins il y a de violence en général (…). Moins il y a d’Etat de droit, plus il y a de violence envers les femmes » (Problèmes d’Amérique latine, n°84, p. 84).
La pollution
Si du Mexique, je garde une impression générale de propreté, notamment parce que les moyens du pays permettent des collectes de déchets ou font que les poubelles de la ville ne sont pas volées pour en revendre le matériau, à mesure que je redescends vers l’Amérique centrale, tout redevient dégueulasse. C’est le règne du plastique, de l’ignorance totale des problématiques environnementales – ou du je-m’en-foutisme, ce qui est pire. Le problème est frappant : dans le bus, d’abord, où les passagers jettent tous leurs détritus par la fenêtre – déchets organiques, sachets en plastique ou aluminium, polystyrène, etc. – ; dans la nature, ensuite, où vous pouvez constater le résultat : rivières noircies, où flottent les déchets en abondance, chemins montagneux dont les bas côtés sont jonchés d’ordures, etc. Si vous entrez au Guatémala par la Mesilla, vous pourrez observer un gigantesque dépotoir où les ordures dégringolent depuis les hauteurs d’un promontoire, que des vautours viennent se disputer.
L’absence de conscience environnementale, le je-m’en-foutisme des pouvoirs publics, l’incompétence et la corruption n’aident pas à engager une vaste campagne d’éducation, qui serait nécessaire. Du reste, eu égard aux problèmes de violence, de malnutrition infantile, de corruption, de narcotrafic, de travail des mineurs et tant et plus, l’écologie n’apparaît guère comme une priorité.
Quelques initiatives, quoique minoritaires et marginales, semblent montrer la voie. C’est le cas, par exemple, du Refuge du Quetzal, dans le département de San Marcos (Guatémala), où un espace forestier tropical somptueux est préservé. Ailleurs, des associations ou des communautés réhabilitent des lieux (le volcan de Chicabal, l’ancienne décharge illégale convertie en bois tropical à Coatepeque, etc.) en espaces propres et écologiques. Le chemin est encore long mais le tourisme, en un sens, peut contribuer à favoriser une prise de conscience – certes, pratique et intéressée – de la nécessité de maintenir propres les lieux. L’affaire n’est, du reste, pas une coquetterie de « bobo écolo » : elle est une considération d’ordre sanitaire, puisque les populations locales polluent leurs rivières et leurs lacs (les lacs Amatitlán et Atitlán sont des désastres écologiques d’envergure) et se condamnent eux-mêmes en faisant disparaître les poissons ou en pêchant et mangeant des poissons hautement contaminés.
C’est pourquoi nous vous invitons à pratiquer un tourisme engagé dans le soutien des initiatives favorisant l’environnement, a fortiori les initiatives communautaires ayant aussi une portée pédagogique.
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Il y a 11 commentaires
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J’adore les bus et les idoles chrétiennes bariolés, c’est complément kitchissime! En Europe on pourrait dire que ça manque de bon gout mais la bas ils aiment, alors ils ne se privent pas 🙂
Je trouve que ça manque de couleurs en France en comparaison.
Bonjour Arno et merci pour votre commentaire.
A force d’observer les yeux étonnés lorsque j’énonçais le verdict de « kitsch » pour telle oeuvre ou tel objet quotidien en la présence d’amies latinas de divers pays d’Amérique latine et tout simplement à force de me voir demander « ça veut dire quoi? », j’en suis venu à la conclusion que la notion de kitsch n’est pas aussi répandue en Amérique latine qu’en Europe.
Ce qui m’a amené à me questionner. En un sens, tout ce qui se veut beau — raté ou pas — et qui renvoie à une transcendance, est à présent quasi systématiquement qualifié de kitsch. Même si je n’adhère pas à ce verdict, Michel Onfray estimait qu’après la « mort de Dieu » énoncée par Nietzsche, c’est la mort du Beau qui était proclamée, le Beau étant lié à la notion de transcendance divine (point très contestable…), ce en quoi Marcel Duchamp inaugurait une ère nouvelle. C’est la beauté qui a été discréditée : Rimbaud s’en était déjà chargée quelques années plus tôt : « Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux. – Et je l’ai trouvée amère ». La beauté a été discréditée dans le champ de l’art : elle n’est, depuis Duchamp, plus un critère. Et, d’une certaine façon, c’est cette vision-là qui s’est répandue à la société, je pense, y qui rend toute manifestation religieuse kitsch, càd laide, ridicule, comique par son grotesque. Disons plutôt que la catégorie de « kitsch » n’existe pas vraiment de façon aussi large et massive qu’en France. De telles choses font partie du quotidien ; elles sont.
Pour élargir, sur le kitsch, et quoique sur le sujet je n’aie pas réfléchi en profondeur (il s’agit donc ici d’intuitions très lapidaires), j’ai peu observer aussi une tendance au kitsch en amour, qui me semble plus répandue, plus commune et acceptée, moins dépréciée, qu’en France. Il ne me semble pas qu’il y ait ici cette façon de tourner au ridicule les manifestations du sentiment. Il me semble qu’il existe ici encore une distance qui sépare du cynisme et de l’ennui européens.
A bientost,
M.
PS – à fond d’accord sur le manque de couleurs, imputable à la législation, aux mairies qui acceptent ou refusent telle ou telle peinture, à l’habitude aussi sans doute. Et pourtant, au Moyen-Âge, par exemple, les cathédrales étaient bariolées comme on n’imagine guère… (Les vêtements déjà moins, si je me souviens bien… ce qui précisément faisant surgir l’éclatant contraste des édifices religieux)
Je te rejoins sur les routes qui sont de vraies déchetteries, le Guatemala est un des pays les plus sales et j’ai vu des gens de tous âges jeter négligemment leurs emballages n’importe où, y compris dans leur propre jardin. On est loin de la prise de conscience…
Voyageant en vélo, les bus n’ont pour moi eu un effet enchanteur ni de l’extérieur, ni de l’intérieur… car le « chauffeur tête-brûlée roulant à tombeaux ouvert » quand il croise un vélo se contente de klaxonner. Et ce klaxon n’est pas un encouragement mais plutôt un avertissement : « soit tu bouges, soit tu vas mangé du bus ! ». Et leur arguments sont convaincants : une fois frôlée une ou 2 fois à quelques centimètres de distances, pas de problème, on s’écarte !
Pour ce qui est des « pub de Jésus » comme je les ai appelé, je les trouvent choquantes et déplacées, mentionnant que « Sans Jesus tu n’es rien », « Ton seul espoir c’est Dieu », ou encore « Seul Jésus peut changer ta vie »… que de réjouissances ! Et quels mensonges que de faire croire à des gens qui ont déjà si peu qu’ils n’arriveront à s’en sortir que de cette manière… Pour moi dans ces pays, la religion est plus utilisé comme un outil politique et un moyen de manipuler les populations qu’autre choses. En passant devant des églises lors de messes, j’avais parfois l’impression d’entendre un discours politique révolutionnaire…
Et enfin pour la violence je pense ne concerne que peu le touriste (à part le vol je ne pense pas qu’il est exposé à grand chose à moins de s’impliquer dans des histoires de drogues ou autres). Elle existe certes, j’ai entendu des histoires horribles, mais je pense que lorsque l’on parle de violence il faut contrebalancer : j’ai traversé le Guatemala seule à vélo et n’ai rencontré que des gens charmants, accueillants et très chaleureux, j’ai logé chez l’habitant et ai vécu des expériences plus enrichissantes les unes que les autres.
Bonjour Astrd, merci pour ce commentaire.
Je trouve du charme aux bus seulement sur le plan esthétique ; ces bus repeints dans des couleurs diverses, oui, me plaisent. Pour tout le reste, c’est calamiteux. Des chauffeurs prétendument croyants qui n’ont aucun respect de la vie de leurs passagers ni, d’ailleurs, de leurs oreilles, des assistants bêtes comme choux qui passent leur journée à reluquer le cul des passantes et les siffler, une conduite à toute berzingue qui est vraiment risquée, sans parler de leur musique de merde qu’ils déversent en abondance et à grand volume : rien de tout ça n’a de charme.
Concernant les évangéliques, certaines églises sont politisées, d’autres pas ; en tout état de cause, le phénomène a crû dans les années 80 avec l’appui de personnes, dont le génocide — et évangélique — Efrain Rios Montt, sur fond de destruction de la culture autonome-communautaire, des mouvements contestataires (marxistes-léninistes, socialistes ou autres)… Difficile de ne pas y voir avant tout l’arrière-plan politique. Pour autant, il y a des croyants dont la droiture et l’altérité sont renforcés dans la foi, de la même manière qu’il y a des salauds. J’ai tendance à préférer voir le phénomène sous l’angle politique : il contribue à accroître la division dans une société déjà très divisée, et évidemment à inciter à se détourner de tout combat politique par la résignation et la passivité qui sont les formes les plus répandues de l’espérance.
Concernant la violence extrême, elle concerne en effet très peu les touristes. Je pourrais toujours évoquer l’attaque dont j’ai fait l’objet avec mon ex-compagne sur les sentiers du lac Atitlan, mais grosso modo, tant que tu restes dans les clous et observe les règles de prudence élémentaires (on n’est pas sur la côte d’Azur), faut pas flipper non plus. Et, globalement, oui sur le verdict d’hospitalité et de gentillesse.
By the way, ça te dirait de nous raconter ton expérience de voyageuse à vélo ?
Cordialement,
Mikaël
Bien d’accord Arno pour les couleurs, et ça se confirme dans de nombreux pays : la France c’est un peu fade mais c’est sans doute ce qui fait son charme aussi… (selon les endroits tout est relatif). En tout cas je me régale a immortaliser toutes ces façades peintes, un régal pour les yeux !
Oui volontiers Mickaël, tu peux m’envoyer un mail si tu veux en me disant ce que tu voudrais savoir !
Je suis un peu débordé en ce moment, mais je te promets de te recontacter. Je ne peux te dire quand, mais je le ferai.
A bientost,
M
J’ai passé 6 mois l’année derniers en Amerique Centrale à l’exception du Salvador et là je fais la même au Mexique. Bout à bout ça me fera un peu plus d’un an à me promener dans cette partie du monde que j’apprécie beaucoup. De Cancun au Costa Rica via La Mosquitia ….
Grosso modo tu nous racontes que leurs bus sont jolis mais pourris , que contrairement à nous autres les européens civilisés, ils sont englués dans des bondieuseries de pécores, qu’ils sont méchants avec les femmes et que grosso modo vivement qu’ils se mettent à vivre comme nous autres qui savons tout tellement mieux que les autres.
N’as tu pas honte avec ta pile de dollars en poche et tes préoccupations de journaliste à 2 sous de juger des gens qui vivent avec 200 $ par mois , qui se sont embourbé depuis toujours les espagnols, leurs curés et ensuite la CIA et maintenant les narcos. Qui es tu pour dire ce qui est bien ou mal ? qu’est ce que tu ferais à leurs places ? ça te dérange que les plages soient sales et t’as peur dans les transports et bien va ailleurs . On est des visiteurs, si ça nous plait pas, on bouge mais on va pas leurs chanter la messe.
Tu prends des bus, tu manges des tamales dans la rue , tu vas glander à Atitlan et t’imagines que c’est du journalisme et tu m’invites à du tourisme responsable blabla mais qui es tu pour m’inviter ? va te faire foutre avec ta morale de touriste responsable pendejo ….
Ah, que j’aime les petits cons qui imputent des idées qui ne sont pas formulées, devinant entre les lignes ce qui n’y est pas formulé…
Tu as passé six mois dans la région? J’en suis fort aise. Je vis dans la région (à Xela et à Guatémala-Ville) depuis 1 an et 1/2 et me marie cet été au Guatémala ; dans le cadre de travaux d’enquête, je rencontre des guides touristiques, des anthropologues, des travailleurs sociaux, des militants, des personnalités religieuses, des citoyens… Je commence à avoir du Guatémala une connaissance basée autant sur l’expérience quotidienne et les amitiés que sur des recherches.
Grosso modo tu nous racontes que leurs bus sont jolis mais pourris
Ouais, et les Guatémaltèques eux-mêmes se plaignent d’ailleurs du service misérable en matière de transports, de la conduite dangereuse des chauffeurs, des accidents réguliers, des hausses de tarif arbitraires, etc. T’as qu’à lire, par ex, cet article de la Prensa Libre, wey.
Tu peux même prolonger par ici : http://www.prensalibre.com/sacatepequez/Usuarios-critican-aumento-pasaje_0_1092490773.html
que contrairement à nous autres les européens civilisés
Ah ! il fallait bien que le bon voyageur de gauche amène sur le tapis la question du racisme, belle litanie incontournable depuis les années 80.
Qu’est-ce qui civilise ? Le respect de la vie et d’autrui, des conditions économiques suffisantes pour vivre décemment, l’attachement à ses racines, à des repères collectifs qui structurent l’individu. N’importe quel psychiatre un peu honnête te le dirait ; au pire, je te renvoie vers Charles Melman et Christopher Lasch.
Au Guatémala, on constate un processus décivilisant qui est dramatique — et qui n’a rien à voir avec du racisme. C’est bien parce que le Guatémala est corrompu jusqu’en profondeur par l’imaginaire libéral nord-américain, relayé par l’oligarchie, les médias, puis les élites locales (je te renvoie par ex au travail des anthropologues Hugo Lopez et Rudy Ixcaragua sur la cofradia de Zunil), transmet l’idée d’une liberté comme déracinement, l’enthousiasme de la marchandise et de la consommation, le choix pragmatique dans une économie ouverte de cursus techniques (de toutes façons, les humanités ici, c’est peau de chagrin, l’université San Carlos est reconnue comme médiocre et aux mains de politiques, les universités privées se chargeant d’enseigner du technique, donc de former les experts du capitalisme de demain), une prodigieuse ignorance de leur propre histoire qui est bel et bien organisée, et je t’en passe, car le tableau est terrible.
Le problème, ce n’est pas que nous serions, Européens, civilisés et les Centre-américains pas. Le problème est ailleurs, mais il faudrait que tu te retires tes oeillères de gentil antiraciste de « gauche » et que tu envisages le problème sous un angle d’analyse à la fois marxiste (analyse de classes) et à la fois anthropologique : la misère décivilise par de nombreux processus qui génèrent les migrations, la déculturation, la destruction de la cellule familiale et des solidarités communautaires, l’alcoolisme, la violence (que ça te plaise ou pas, les statistiques parlent et le nier serait simplement dire aux féministes d’ici et aux personnes désireuses de plus d’égalité et de justice sociale… que leur démarche est idiote).
Remballe ton antiracisme, et vois les choses sous l’angle de l’anthropologie du capitalisme avancé.
ils sont englués dans des bondieuseries de pécores, qu’ils sont méchants avec les femmes et que grosso modo vivement qu’ils se mettent à vivre comme nous autres qui savons tout tellement mieux que les autres.
Tu tires des conclusions de paresseux prétentieux, en inférant des choses qui ne sont pas dites. Présenté à des amis guatémaltèques, l’article fait plutôt l’unanimité. Interroge-toi plutôt sur ton obsession antiraciste.
N’as tu pas honte avec ta pile de dollars en poche et tes préoccupations de journaliste à 2 sous de juger des gens qui vivent avec 200 $ par mois
Absolument pas. Ce pays est aussi le mien puisque mon avenir s’y attache, et probablement pour des décennies, et pas 6 mois. Tu peux te permettre un regard superficiel et dire que les gens sont chouettes, si tu veux. Moi je vois les ravages causés par la misère organisée par l’oligarchie et provoquée par un coup d’Etat il y a 60 ans au nom du capital, et dont ce peuple n’en finit pas de payer les frais. Je vois la réalité de l’incompétence, l’étendue déplorable de la malhonnêteté ; je lis dans les journaux et revues nationales les faits scandaleux de corruption, de narcotrafc, de détournements de fonds, de violences brutales et gratuites (corps démembrés, enfants violés : quotidiennement des faits divers d’une horreur qui ferait un scandale national en France).
qui se sont embourbé depuis toujours les espagnols, leurs curés et ensuite la CIA et maintenant les narcos.
Ces propos contredisent les précédents puisque tu dénonces d’un côté que je pointe du doigt la bondieuserie… et de l’autre côté tu vois dans les curetons une partie des responsables des maux. Renseigne-toi un peu sur les évangéliques, qui les appuie financièrement, quelle est leur fonction sociale ; visite un peu les temples, les stades de la foi de la capitale ; regard un peu les émissions, écoute les prêches. Lis un peu sur la théologie de la prospérité. Tu comprendras peut-être l’envergure du désastre anthropologique dont il est question… et dont les USA portent une responsabilité colossale et prépondérante.
Qui es tu pour dire ce qui est bien ou mal ?
Un homme qui envisage la possibilité de demander la nationalité guatémaltèque dans quelques années.
qu’est ce que tu ferais à leurs places ? ça te dérange que les plages soient sales et t’as peur dans les transports et bien va ailleurs.
Lis cet éditorial au lieu de raconter de la merde.
Tu prends des bus, tu manges des tamales dans la rue , tu vas glander à Atitlan et t’imagines que c’est du journalisme et tu m’invites à du tourisme responsable blabla mais qui es tu pour m’inviter ? va te faire foutre avec ta morale de touriste responsable pendejo ….
Ah, beau voyageur authentique. Le lac Atitlan, j’y suis allé 3 fois en 2 ans : 1 seule fois pour faire la fête à San Marcos avec mes amis ; les autres fois dans des coins pas touristiques, dont une avec ma future épouse pour prendre les mesures de fenêtres d’une maison. Très touristique en effet.
Après avoir vécu environ 5 mois à la capitale chez deux anciens (des évangéliques, d’ailleurs, avec qui je participais chaque semaine à des études bibliques), je suis de nouveau à Xela, où je passe mes journées à bosser, quand je ne me rends pas dans la famille dans les Cuchumatanes ou à Reutalhuleu. Très touristique en effet.
Allez, fais tes trois petits tours du Mexique, charmant voyageur authentique, et retourne-t’en en France, ragaillardi et renforcé dans tes convictions.
PS – pendejo, c’est pour le Mexique ; au Guatémala on dit plutôt cerote
Bjr,
Je reviens du Guatemala, je partage totalement l’analyse de Michael; quand à V7X attention au jugement hâtif………..
Cordialement
« V7X » a passé 6 mois en Amérique centrale. Son âme de voyant, qui éponge le monde avec une intensité sans égale, a saisi ce que c’est que vivre, au quotidien, dans ces pays.
Quant à moi qui n’y ai passé que 2 ans, je suis un pendejo.