Situé dans le département de Sololá, au sud-ouest du Guatemala et au cœur de la longue chaîne qui forme l’arc volcanique d’Amérique centrale, le lac Atitlán est une des réserves d’eau douce les plus importantes du sous-continent. D’une superficie de 130km², d’une profondeur moyenne de 188 mètres et pouvant dépasser les 300 mètres, il est situé à 1554 mètres au-dessus du niveau de la mer.x
Atit... quoi?
D’après El libro de las geonimias de Guatemala, de l’historien Jorge Luis Arriola (1973), il existerait trois versions possibles de la signification d’Atitlán : 1. « Lieu d’eau abondante » (atl signifiant « eau » et titlán « lieu ») ; 2. « Parmi les eaux » (autour d’une étymologie a-ti-tlán : atl = « eau », ti = ligature et tlán = suffixe de pluralité) ; 3. Pourrait dériver de la langue pipil : atl = « eau » et tlán = « colline », soit « colline entourée d’eau ».
Atitlán est un lac volcanique, issu d’un long processus tectonique et volcanique d’environ quatorze millions d’années, qui a vu des volcans surgir, exploser et disparaître pour en former d’autres. Ce qui le rend si spectaculaire et unique, c’est qu’il est entouré de trois volcans : Tolimán (3158 m), Atitlán (3537 m) et San Pedro (3020 m), tous situés au sud du lac. De l’autre côté, le relief est formé de hautes collines et de montagnes formant un relief abrupt, où l’on peut même observer parfois des cascades.
Hautement pittoresque, c’est, avec Antigua Guatemala, un des lieux dont les Guatémaltèques sont le plus fiers et dont abondent les représentations peintes. Un art populaire très vivant, puisqu’il est fréquent de trouver de telles peintures, charmantes et colorées, dans les maisons des Guatémaltèques. C’est donc, très logiquement et depuis au moins les années 1950, l’un des hauts lieux touristiques du pays. Et loin d’être réservé aux étrangers, qui viennent en effet du monde entier, il est très apprécié des Guatémaltèques eux-mêmes, qui s’y rendent en famille ou entre amis
Situés sur ses rives ou un peu en retrait, divers villages se trouvent tout autour du lac. Les plus connus et fréquentés sont surtout Panajachel, principal embarcadère touristique, mais aussi Santiago Atitlán, San Pedro La Laguna, San Juan La Laguna, San Pablo La Laguna, San Marcos La Laguna et Santa Cruz La Laguna. Un peu moins connus, il y a aussi Jaibalito, Santa Catarina Palopó, San Antonio Palopó ou San Lucas Tolimán. Petit tour d’horizon.
Panajachel, la plus « tourisme de masse »
Avec sa longue rue piétonne tendue vers l’embarcadère-débarcadère, flanquée de part et d’autre de restaurants et de boutiques, Panajachel fera fuir les amoureux de « l’authentique », qui ne verront que le verre à moitié vide et le côté « tourisme de masse » et artificiel. Et il est certain que l’on y trouve certains travers des lieux trop massivement touristiques : quelques restaurants interchangeables (mais dont les tarifs sont raisonnables), des commerçants qui vendent aux étrangers des produits artisanaux à quatre ou cinq fois leur prix réel. Mais rien de démesuré non plus, pas de hordes de vendeurs ambulants qui se ruent sur le touriste. L’arnaque a même des airs d’aimable et souriante couillonnade et les acquéreurs, le plus souvent, ignorent totalement qu’ils se sont fait rouler. En bref, si « Pana » (comme le nomment les Gringos) est un lieu touristique, ce n’est pas non plus le Mont-Saint-Michel, Barcelone ou Venise en haute saison. Une impression qui vaut, d’ailleurs, pour le pays en général.
Mais on peut aussi bien voir le verre à moitié plein. D’abord, Panajachel est un bon point de chute et s’y loger une semaine pour découvrir le lac Atitlán et ses environs peut être une bonne idée. L’éventail d’offres d’hébergement y est très large, depuis la petite auberge de routard jusqu’à l’établissement de luxe. Plus d’une fois, j’y suis arrivé le soir et ai pu trouver une solution de logement en moins d’une heure.
Panajachel et sa galerie d’art
La sobrement nommée Galería Panajachel expose des œuvres, essentiellement des peintures, d’artistes locaux ou d’étrangers résidents (Allemagne, Autriche, Pays de Galles, États-Unis…). Beaucoup de motifs locaux : vie quotidienne des indigènes, vues du lac Atitlán, ainsi que quelques abstractions.
Loin d’être une « petite » galerie quelconque, la Galería Panajachel expose des peintures de qualité. Fusionnant une figuration ancrée dans le modernisme avec les thèmes et couleurs locaux, la plupart des artistes développent une esthétique actuelle sans avoir sacrifié le goût du métier, du savoir-faire au conceptuel et au tapageur à la mode.
Si la majorité des œuvres sont des peintures, on trouve aussi de la gravure, de la photographie et de la sculpture. Les passants trouveront là un art accessible et chamarré qui devrait les séduire ; les amateurs et connaisseurs y feront des découvertes et les collectionneurs avisés pourraient y faire de vraies affaires. À découvrir, de toute façon, incontestablement.
Site de la galerie : galeria-panajachel.com
Le jardin de papillons du lac Atitlán
Situé un peu à l’écart de Panajachel, Reserva Natural Atitlán propose diverses activités au cœur de la nature : câbles et tyroliennes, belles balades sur des sentiers au milieu d’une nature profuse. Ce qui, surtout, vaut le détour, c’est le beau jardin de papillons qui a été réalisé là.
Un géodôme de dix mètres de haut a été conçu pour accueillir et protéger un millier de papillons d’une douzaine d’espèces, dont certaines nécessitent cette hauteur (les Héraclides et les Morphos). Pierres, briques, plantes exotiques colores : l’espace est élégamment mis en scène, où les papillons bénéficient d’un habitat à l’abri des prédateurs et où certaines plantes indispensables à leur cycle de vie, mais qui se sont fait rares dans la nature, leur permettent de se reproduire. Dans cet espace dédié, les larves puis les papillons adultes peuvent donc s’alimenter : le jardin des papillons se revendique comme un « oasis de biodiversité ».
Site : atitlanreserva.com
San Pedro La Laguna, la plus festive
Moi qui ne suis pas trop fêtard, j’avais suivi avec ma femme,pour le Nouvel an 2014 des potes là-bas. Ambiance bon enfant et pétards étaient au programme, comme toutes les nuits de fête au Guatemala. San Pedro a son lot de restaurants et de bars-discothèques pour s’amuser entre amis. Ce n’est plus trop dans mes goûts de trentenaire, mais le village a manifestement du succès auprès des plus jeunes, des fêtards et des hippies gringos. Il est ouvent considéré comme plus « authentiques » par les voyageurs « alternatifs ». L’activité économique locale doit cependant beaucoup aux touristes, qu’ils soient « alternatifs » ou pas, ce qui ne différencie pas vraiment, au fond, San Pedro des autres villages tout autour du lac. C’est plutôt une affaire d’ambiance.
Paisible bourgade, San Pedro abrite quelques écoles d’espagnol à tarif modique et offre quelques activités d’excursion.
Et avec des yeux de volcanologue, on voit…
On voit d’abord le contexte : Pourquoi un volcan ? Pourquoi là et pourquoi si grand ? Parce qu’il y a… la ceinture de feu du Pacifique : moins de 200 km au sud-ouest du lac Atitilán, la plaque Pacifique plonge sous la plaque sud-américaine. Ce phénomène (la subduction) est à l’origine d’un volcanisme intense et explosif, dont le lac est une expression.Les eaux du lac Atitlán remplissent une caldera : une immense dépression causée lors d’une éruption titanesque. Pour schématiser, lorsque d’importants volumes de magma sont expulsés, la chambre magmatique est vidangée et ne soutient plus le poids des roches qui sont au-dessus d’elle. Ce toit s’effondre causant une dépression dans laquelle les eaux des rivières avoisinantes peuvent s’accumuler : voilà notre lac.
Pour être plus précis, ce sont plusieurs calderas qui se sont succédées dans l’histoire du bassin du lac Atitilán. En effet, le passé volcanologique du lac Atitlán et des volcans qui l’entourent (Atitlán, Tolimán, et San Pedro) est complexe. Il est ponctué d’une série d’épisodes de destructions et d’édifications, constituant de véritables mille-feuilles de dépôts dus aux éruptions successives. En majesté sur le lac, règnent les stratovolcans.
Cette histoire débute il y a quatorze millions d’années et s’étire jusqu’à l’actuel. L’activité la plus récente confirmée se situe sur le volcan Atitlán (1853).
En un mot, où le promeneur voit le calme des eaux de ce lac sublime, le volcanologue ne voit que fureur, lutte entre construction et destruction, gigantisme de la machine terre.
Éclairage de Volcadoc
Source : ResearchGate.net.
San Marcos La Laguna, ou le lac Atitlán version hippie
C’est un peu le repère des touristes étrangers amateurs de yoga, d’écologie, de végétarisme ou de pratiques new age. J’y retourne à la fin de l’année. Je vous en dirai plus alors.
Santa Cruz La Laguna
En tout et pour tout, ma connaissance de Santa Cruz La Laguna se résume au séjour que j’ai passé à l’hôtel Isla Verde. Ou la belle histoire d’une Espagnole qui travaillait dans la finance et qui, lassée du non-sens de son boulot, a décidé de lever le camp et s’installer au Guatemala où elle a investi dans un hôtel écologique. Un changement radical et assez admirable. Si demain je gagnais la lotterie, c’est probablement ce type de choses que je ferais : acheter du terrain et organiser un vaste chantier participatif pour échafauder un hôtel-bar-restaurant-lieu culturel permaculturel.
Au programme : cabanes avec vue sur le lac Atitlán, permaculture, produits bio locaux, jacuzzi et temascal (sauna rituel maya) et tout un tas d’activités prisées des hippies mais pas seulement (massage intuitif, suédois, massage des tissus profonds, massage sonore au bol tibétain, shiatzu, initiation aux plantes médicinales et aux thérapies florales, yoga et méditation).
Santiago Atitlán
Santiago est connue en particulier pour son Maximón, saint païen entouré de rituels singuliers.
La peinture du lac Atitlán
« Dans trois communes qui bordent le beau lac Atitlán (Santiago Atitlán, San Pedro La Laguna et San Juan La Laguna, tous les trois de langue tz’utujil), se trouve un autre aspect de la plus haute importance de la peinture indigène contemporaine du Guatemala.
Les premières peintures indigènes de Sololá sont apparues à la fin des années 1920. En premier lieu, il convient de mentionner le vieux maître Rafael González y González (1907-1966), qui commença à peindre avec des matériaux colorants à base d’anilines mélangées à une substance produite par l’arbre de grevillea robusta (chêne soyeux). Bien que ses premières œuvres datent de 1929, sa peinture commença à gagner en qualité à partir de 1940.
À partir des années 1950, les fils du maître González y González, José Antonio et Ángel Rafael, se sont fait connaître du public avec des tableaux qui, comme ceux de Comalapa dans leur région, représentent les coutumes et les rites populaires de la société tz’utujil.
Juan Sisay (1921-1989) est, sans aucun doute, l’artiste le plus connu de la plastique indigène contemporaine du lac Atitlán. Parrainé par le président Miguel Ydígoras Fuentes, Sisay a promu son œuvre à l’intérieur du pays et voyagé en Amérique du Nord et en Europe, organisant des expositions à succès à Washington, Paris et dans d’autres capitales européennes. Ces tournées lui apportèrent le prestige et l’encouragement et, en outre, valorisèrent économiquement sa peinture, qui la conduisirent à être cotée à l’égal des grands maîtres de la plastique guatémaltèque classique (…).
La peinture du lac Atitlán est (…) élaborée et lyrique et conserve un sens esthétique classique ; elle utilise avec beaucoup de réussite le clair-obscur, technique dans laquelle se distingue fondamentalement le travail des frères González Chavajay, qui ont exposé leur œuvre au Guatemala et à l’étranger. »
(José Antonio Móbil, Del realismo a la abstracción, éd. Serviprensa, Guatemala, 2016, pp. 66-69. Traduction : Mikaël Faujour.)
Crédits photographiques : Édgar Padilla Bartlett (sauf mentions contraires), photographe guatémaltèque.
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